Jean Roy, Diapason, Récital Fauré Nimbus.

On attendait depuis longtemps cet enregistrement d’œuvres de Gabriel Fauré. Ayant eu, dans sa jeunesse, le privilège de séjourner à Annecy-le-Vieux dans la même demeure que le compositeur, Vlado Perlemuter est l’héritier d’une tradition. De profondes affinités existent entre le pianiste et les œuvres qu’il interprète. C’est la même passion voilée de pudeur, la même ardeur tempérée par le goût, la même recherche d’une vérité intérieure et le même dédain de la virtuosité pour la virtuosité, le même sens de la polyphonie, la même conception de la grâce, excluant frivolité et mièvrerie.

Le programme comprend cinq des Nocturnes et une Barcarolle que l’on peut ranger parmi les œuvres majeures de Gabriel Fauré, le Thème et Variations op. 73 dont Vlado Perlemuter avait déjà gravé au Japon, en 1972, une première version dans un programme Ravel-Debussy-Fauré (Denon). Les 2ème et 5ème Impromptus viennent apporter la détente nécessaire. En comparant la précédente version de Thème et Variations et celle-ci, on observe qu’aujourd’hui, si le tempo est sensiblement le même, le jeu de Vlado Perlemuter a gagné encore en fermeté et en intensité. Dans les Nocturnes on remarque, outre l’ampleur de la sonorité et la variété des nuances (à l’intérieur d’une gamme qui ne va pas jusqu’aux extrêmes, ni dans le forte, ni dans le pianissimo), le naturel du discours, la perfection de la ponctuation… Tout semble couler de source... L’essence classique de l’art de Fauré apparaît à l’évidence – mais avec tous les charmes et l’émotion qui s’en dégagent.

La 5ème Barcarolle s’enchaîne au 6ème Nocturne et précède le 7ème sans qu’il y ait entre ces trois opus rupture de climat. Quant aux Impromptus, dont je disais qu’ils étaient appelés à jouer un rôle de détente, la souple animation de l’Opus 14, dans un tempo volontairement modéré, et la lumière qui fuse de l’Opus 102 apportent en effet une diversion à l’univers nocturne qui est celui des autres œuvres, y compris Thème et Variations (au moins dans la 9ème Variation). Le récital s’achève sur les 12ème et 13ème Nocturnes où l’amertume de la vieillesse cède devant l’irruption des souvenirs. Vlado Perlemuter les interprète dans un sentiment passionné qui, une fois encore, correspond à la vérité de ces œuvres. Les derniers Nocturnes disent l’ascension d’un musicien qui est toujours allé en progressant. Ainsi, à son image, Vlado Perlemuter…

 

1 CD Nimbus 5165. Jean Roy. Diapason n°348, avril 1989. Reproduit avec l’aimable autorisation de l’auteur.

 

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